Après le passage, ce début d’année, d’« Ingunn » et de son tempérament bien trempé, dans les Îles Versterålen en Norvège, Kristian et moi poursuivons notre périple plus au Nord. « Further North… ! », nous indique notre unique boussole.
Nous traversons des étendues blanches, habillées de l’opacité et de l’haleine des tempêtes. Nous allons de fjords en fjords. Parmi eux, certains nous ouvrent les bras, d’autres nous enserrent, comme pour nous protéger du vent et de ses fureurs. Celui que nous évoquons ici est de ceux qui vous laissent à découvert, qui vous invitent aux premières loges, billets VIP, pour bien admirer le tableau et vous faire éclabousser. « Vous vouliez du spectacle ? Et bien, profitez-en ! », nous semble-t-il entendre dans la voix des éléments qui se rient de nous, fluets bipèdes, qu’ils pourraient faire valser comme de frêles feuilles.
Les tempêtes se succèdent et prennent d’assaut notre petit rorbu. Cette nuit-là, n’y tenant plus, jedécide de m’équiper et de sortir prendre un bain de bourrasques.
La nuit me happe, le froid polaire me saisit, le blizzard me chahute. Le vent est puissant, je m’accroupis au sol et tente d’installer et de stabiliser mon trépied sous les rafales. À cette tourmente arctique, je compte bien lui tirer son portrait. Des volutes de neige tourbillonnante se créent sur le sol, des tornades miniatures dansent et virevoltent dans tous les sens, déchaînement de l’hiver. Je n’y vois pas grand-chose, de petites particules de glace sont projetées à tout va, elles fouettent mon visage pourtant bien protégé. Je déclenche et photographie la tempête et, étant donné le degré de vibration de mon trépied, je ris à l’avance à l’idée de mes photos floues. Ça tombe bien, j’adore le flou photographique. L’arctique est plein d’humour !
Toute à mes préoccupations au ras du sol, je ne prête pas attention au dénouement du ciel. Et puis soudain, je l’aperçois, entre d’épais nuages, d’abord timide, puis se dévoilant davantage, l’aurore boréale inattendue !
L’espace d’un instant, un rideau s’ouvre et laisse entrevoir la voûte céleste, les étoiles et l’aurore qui se met à danser, s’offrant en cadeau. Je me remémore cet adage: « Il faut toujours tenter les sorties au cercle polaire arctique. » Je photographie encore et encore. Mes doigts sont engourdis par le froid incisif, mais, malgré cela, je ressens ce bien-être et cette joie, fidèles compagnes de ces contrées, monter en moi. Le vent redouble de sa force, mon boîtier en perd son latin (en perd son norvégien, ça marche aussi), frigorifié lui aussi. Depuis cette nuit, je lui confectionne d’ailleurs un petit manteau polaire, afin qu’il soit fin prêt pour notre nouvelle aventure en début d’année prochaine.
Dans l’intervalle, Kristian est venu me rejoindre. Nous photographions cette aurore dans la tempête, éblouis par toutes ces beautés dont la Nature recèle. Puis, le rideau se referme et la danseuse disparaît derrière une compacte draperie de nuages.
Elle farandole en nous aujourd’hui encore…
Maguy
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